La vie pure ? Les aventures en Guyane de Raymond Maufrais (livre)
- F.
- 26 janv. 2017
- 4 min de lecture

Voici un post qui change un peu.. J'avais envie de partager avec vous une de mes récentes lectures qui m'a profondément touchée, celle du journal d'un explorateur français nommé Raymond Maufrais disparu en Guyane dans les années 50.
Plein de beaux idéaux et de soif d'aventure, Raymond, journaliste, a 23ans, lorsqu'il décide qu'il sera le premier à relier le Brésil à la Guyane Française par les monts Tumuc-Humac, une chaine d'inselbergs dans le sud de la Guyane. En plus de s'embarquer dans ce projet fou malgré les recommandations négatives des personnes qui l'entourent, il veut y aller seul. Il doit pour cela réaliser toute une partie sur l'eau pour ensuite traverser la jungle amazonienne à pieds. Hélas, après plusieurs mois d'attente de son retour, la France reste sans nouvelle de ce jeune homme... Pas de retour sur la fin de cette exploration solitaire. Un peu plus tard, un indien a retrouvé, en pleine forêt au Degrad Claude, les carnets de voyage abandonnés par Raymond. Personne n'a pu confirmer qu'il était bel et bien mort. Disparition mystérieuse... Certains disent qu'ils ont vu un blanc parmi les indiens. Son père est parti à plusieurs reprises en expédition à sa recherche, faisant le chemin inverse à partir du Brésil pour retrouver ses traces, bravant les conditions difficiles de la vie en jungle, les rencontres avec les indiens et autres. Il est malheureusement revenu bredouille, triste et malade. (voir reportage disponible sur youtube "Au nom du fils").
Ce livre est la version originale de ses notes tenues au quotidien lors de ce voyage solitaire, tel un journal intime. Et je peux vous assurer qu'il a fait preuve de force, courage et détermination dans la poursuite de ses idéaux. On le suit au départ de son périple avec son chien Boby, il partage sa joie de partir en voyage, s'imagine rencontrer des indiens non-contactés, voir des contrées encore jamais explorées et peu à peu, il se retrouve seul dans une jungle hostile avec son sac et son hamac, sans vivre. Il aura bravé seul les obstacles, les dysenteries et autres maladies, la fatigue, les blessures.. Il fini à pieds nus car ses chaussures n'ont pas tenu le coup, son sac non plus d'ailleurs,.. Mais ce qui semble le plus difficile est la faim. Il vit perpétuellement dans la faim qui n'est tributaire que de ce que la nature veut bien lui donner au jour le jour (poissons, oiseaux, singes, tortues, escargots, graines..). Il s'affaiblit et est obsédé par la recherche de nourriture qui empiète énormément sur son avancée et le retarde sur ce qu'il avait prévu. On le suit au jour le jour et on le sent parfois fasciné par ce qu'il vit, d'un positivisme débordant et tantôt dépité dans sa solitude, pensant à ses parents à qui il fait du mal en étant loin d'eux, à ce confort qui l'attend là-bas : "Ah ! L'envie de les revoir est telle que je suis avec eux et la forêt n'existe plus, plus rien n'existe, je suis à la maison". (extrait du livre p.232). Il relativise aussi sur la vie "pure" menée dans la jungle: dormir, chasser, manger, marcher... et la vie "facile" comme nous la connaissons: "La vie de brousse est nécessaire au jeune garçon c'est le plus bel apprentissage à la vie de nos cités, étant une école d'énergie, d'action, d'initiative et de débrouillardise - vie dure, parfois pénible - mais qui apprend à ne jamais compter sur personne sinon sur soi-même pour y arriver (extrait du livre, p.235). Tout le long de cette aventure, il pensera mais jamais il ne renoncera. Au lieu de cela, il prendra du recul et s'auto-analysera à travers ses écrit. C'est l'âme d'un vrai explorateur.
Ce récit de voyage n'était pas dédié à être publié. Rien n'y est romancé ni censuré et s'est pourtant très bien écrit. Il m'a émue et chamboulée. S'en est d'autant plus fort que je sais que cela s'est passé pas loin d'où je vis actuellement. Je n'ai pu m'empêcher de me dire tout le long de ma lecture... "il marche vers une mort annoncée, c'est de la folie !". Préférer la mort à l'échec.. Mais, il y croit et c'est beau... "un instant, j'ai pensé que j'allais mourir de la manière la plus atroce qu'il soit, mourrir de faim, mais mon subconscient veille et je sais que je m'en sortirai , que cette aventure prendra fin, mais demeurera à jamais la plus belle que j'ai vécue jusqu'à maintenant" (extrait du livre, p.255)
Voici le tracé de son chemin réalisé (extrait du livre):

Pour ceux pour qui le sujet intéresse, il existe énormément d'informations à ce sujet:
- Un film sur son histoire est sorti récemment, il s'appelle "la vie pure", je n'ai pas encore regardé, il parait que c'est assez long.
- il existe une association des amis de l'explorateur Raymond Maufrais, voir le site internet: http://www.maufrais.info
- Une rue est même dédiée au père et au fils à Toulon (ville native de Raymond), elle s'appelle: rue Raymond et Edgar Maufrais
- La vidéo sur l'histoire du père Maufrais: https://www.youtube.com/watch?v=pmAxCzPl5gY
- Un article plus poussé sur le sujet: https://www.vice.com/fr/article/lhistoire-de-laventurier-toulonnais-disparu-dans-la-jungle-raymond-maufrais
- Une histoire à son sujet est parue dans la bande dessinée Spirou en 1956 sous le nom d'Otarie Téméraire (totem et quali scout de Raymond).
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